JK Flesh est arrivé un peu sans prévenir, sans grosse publicité annonçant la sortie imminente du machin pendant des mois, sans présentation enjoliveuse et grandiloquente. C’est sans aucun doute la notoriété de Justin K Broadrick, l’homme derrière ce projet, qui a fait office de propagande, car il y aura toujours quelqu’un pour se tenir au courant des derniers projets du sieur pour relayer l’info.
Ainsi donc Broadrick a-t-il abandonné pour un temps au moins son Jesu
essoufflé et tellement repassé qu’il en est devenu insipide (je pense ici au
dernier album qui ne m’a laissé aucun souvenir, c’est dire), pour se consacrer
à un nouveau projet, venant s’ajouter aux (très) nombreuses formations auxquels
il a participé, de près ou de loin. Pour la petite histoire, JK Flesh est le
pseudonyme utilisé par Broadrick pour son projet Techno Animal.
La curiosité comme le doute nous envahissent toujours un peu quand on
découvre ce à quoi l’infatigable de Birmingham c’est attelé. Aurons-nous droit
à un proche de Jesu, guitare saturée d’effets en tout genre et ambiance
« -post », ambient minimaliste à la Final, retour aux sources
Godfleshienne ? Eh bien pas de surprise, on se place très nettement à côté
de Godflesh et de Techno Animal, comme si les démons indus et électro l’avaient
de nouveau titillé. La surprise de cette sortie laisse donc place à une
exaltation non feinte, due au plaisir d’entendre Broadrick redonner libre cours
à ses idées technoïdiques et bruitistes.
Le résultat est plutôt satisfaisant, on se laisse aisément prendre dans
l’univers sombres développé dans ce Posthuman. Broadrick est toujours aussi
brillant pour construire des morceaux efficaces, prenants et intenses sans
tomber dans la facilité. Il se montre également très pertinent dans
l’utilisation des sons, chacun trouvant sa place dans la cacophonie globale,
chacun étant aussi très bien travaillé, de manière à être percutant et évitant
ainsi l’écueil de bien des compositeurs électro qui utilisent moults sons même
pas travaillés qui sonnent bien fades.
Les références sont variées, et si l’on pense à Godflesh et Techno
Animal, ce n’est pas uniquement car il s’agit du même compositeur, mais bien
parce que ce Posthuman poursuit ce qui a été abordé avec ces deux formations.
On croise aussi ici où là quelques plans à la Greymachine (toujours rien
d’étonnant donc). On croirait même parfois entendre du dub step, mais de
manière très subtile et sans que cela ne sonne « j’en-fait-parce-qu’-i-n’-en-veulent ».
Globalement, on pourrait même penser qu’avec ce nouveau projet Broadrick
synthétise ce qu’il a pu expérimenter ici ou là, il rassemble ses idées pour
tenter de construire quelque chose avec tout ce qu’il possède.
JK Flesh nous propose donc un album honnête, efficace, tout à fait
sérieux de bout en bout. Pourtant, malgré la qualité indéniable de l’œuvre, on
ne tressaute pas de joie, on ne se roule pas par terre en hurlant, et sans
aller jusqu’à dire que nous restons de marbre (car ce n’est pas le cas), on
finit par se demander quand même ce qu’on tient dans la main. Tout est là pour
avoir un objet majeur, mais on passe tout de même à côté du « truc »
qui amènerait ce sentiment de toucher à quelque chose d’unique, de
transcendant, ce que nous ressentons toujours ou avons ressentis à l’écoute des
albums clés de nos discographies. La raison n’est peut-être pas si
compliquée : Posthuman ne se distingue pas tant que ça, il ne marque pas
les esprits. Si on se le remet aisément dans les écoutilles, il semble ne pas
vraiment y avoir de passage essentiel sur l’album, rien qui n’accroche
réellement ou qui sorte vraiment du lot.
L’ambivalence me gagne donc lorsque j’évoque cet album, car j’ai autant
envie de le défendre que de l’oublier, je le conseille tout en précisant que ce
n’est pas l’album du siècle. Mais après tout, est-ce bien ce que j’attendais de
la part de Broadrick ? Pas nécessairement. Alors, pourquoi pas.
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